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Sao Tomé - Seule la chute des noix de coco dérange la quiétude

Sao Tomé, Sao Tomé et Principe - Sous les eaux turquoise un plongeur sillonne les côtes d'un archipel de l'Afrique de l'Ouest et aperçoit un tout petit hippocampe. 

La scène se déroule à Sao Tomé et Principe, qui baigne dans le golfe de Guinée, limpide comme un aquarium. Couvertes de palmiers, ces îles volcaniques en plein sur la ligne de l'Équateur et recèlent des secrets, à l'abri de l'agitation du monde : pas de tourisme de masse, pas de circulation, pas de terrorisme. Pas encore, à tout le moins.

Si vous voulez échapper au stress de la vie du XXIe siècle, pensez à visiter ce havre de paix où la pire menace, comme vous le rappelle un panneau près de la piscine d'un hôtel, réside dans la chute de noix de coco. 

Il n'est pas facile de se rendre à Sao Tomé. Seuls quelques vols relient l'archipel. 

"C'est un pays sans touristes", a commenté un des rares visiteurs, le Français Jean-Pierre Elophe, en sirotant son cocktail dans un joli bar perché sur un quai. 

"C'est sauvage, à l'état vierge", renchérit son épouse Martine avant d'ajouter : "C'est zen." 

Mais avec les milliards de barils de pétrole qui se trouveraient au large, Sao Tomé est peut-être à la veille de grands bouleversements. 

Pour l'instant toutefois, la simple évocation de son nom suscite la perplexité ou appelle un regard médusé même chez les globe-trotters les plus chevronnés et les agents de voyages. Ce paradis perdu ne fait pas les manchettes et ne figure pas dans les brochures promotionnelles. 

"La première question que les gens posent, c'est : '' Où est Sao Tomé ? ''", a lancé M. Testori qui a ouvert un commerce de sport nautique il y a trois ans. 

"La deuxième question, c'est : '' Qu'est-ce que tu vas faire là-bas ? ''" 

À plusieurs centaines de kilomètres du continent africain, Sao Tomé serait resté inhabité jusqu'à sa découverte par les navigateurs portugais au XVe siècle. 

Ils y établissent rapidement un commerce du sucre florissant fondé sur l'esclavage. Au XXe siècle, le pays devient un des plus gros producteurs de cacao. 

Sao Tomé et Principe s'est peu développé depuis son indépendance en 1975. Sa population est pauvre. Mais les fruits de mer sont abondants et la vie sur l'île semble idyllique. 

La capitale a des airs antillais. Plusieurs églises percent la ligne basse des petits immeubles d'un étage aux couleurs pastel, datant de l'époque coloniale, avec leurs fenêtres arquées et leurs balcons ornementés. De larges boulevards longent le front de mer. 

Les pêcheurs mènent leurs canots sur les plages sablonneuses et vendent directement leurs prises, calmars, crabes, crevettes et poissons géants en abondance. 

Les touristes qui aimeraient lancer la ligne eux-mêmes pour attraper des marlins ou d'autres grands poissons pourront s'adresser aux grands hôtels qui offrent des sorties, en plus de tours d'observation de baleines ou de dauphins de juillet à octobre. 

Les plongeurs à masque et tuba peuvent quant à eux se pointer au Lagoa azul (Lagon bleu), une baie turquoise, au pied d'une colline surmontée de baobabs et d'un phare. Les tortues pondent aussi sur ces rives de galets. 

Quant aux randonneurs, ils pourront affronter le sommet de l'île, Pico de Sao Tome, du haut de ses 2024 mètres. Une ascension de deux jours vous mènera à la cime, le cratère d'un volcan éteint. 

Les tours de l'île en voiture ou en bateau ne manquent pas de passer devant la Boca de Inferno, la "Bouche de l'enfer", un trou sur la côte dans lequel les vagues s'engouffrent pour ressortir à la verticale par une cavité au sommet du rocher noir. 

Les routes côtières sont magnifiques. Elles se faufilent entre les palmiers qui s'étirent au-dessus des plages de sable blanc ou noir. À l'intérieur des terres, des champs de bananes, de café et de cacao se répandent sur des collines qui cachent des chutes d'eau. 

Mais plus que tout, c'est l'atmosphère remarquablement décontractée qui fait le charme de Sao Tomé. Le ministre des Affaires étrangères emprunte à moto une promenade le long de la mer, sans garde du corps. 

Alors qu'ailleurs en Afrique, les autorités sont tatillonnes à propos de la prise de photos, à Sao Tomé il n'en est rien. Un photographe de l'Associated Press qui a croqué des clichés d'un garde devant le palais présidentiel a été interpellé par un officiel qui l'a conduit à l'intérieur, non pas pour le sermonner sur la sécurité, mais pour lui dire que le soldat avec sa tenue de camouflage n'était pas, à vrai dire, assez bien vêtu... 

Les crimes graves sont rares, la police et les armes à feu, encore plus. Les forces armées du micro-État comptent à peine 600 hommes. 

Au cours de la dernière décennie, la moyenne annuelle de visiteurs a avoisiné les 6000, pour la plupart des Portugais, a précisé Manuela Lima Rita, numéro deux au ministère du Tourisme. 

C'est néanmoins beaucoup de touristes, pour un pays dont la population est de seulement 150 000 habitants. 

"C'est un risque, a commenté Mme Rita. Nous sommes petits, nous ne voulons pas être submergés. Mais nous tenterons d'être sélectifs. Nous n'allons pas adopter le tourisme de masse." 

La plupart des citoyens de Sao Tomé et Principe vivent avec moins de 1 $ par jour et espèrent qu'un boom pétrolier les sortira de la misère. Les droits d'exploitation d'un premier champ pétrolifère dans le golfe de Guinée ont été vendus à ChevronTexaco et Exxon Mobil plus tôt cette année.

Florian Silnicki