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São Tomé-et-Principe, soeurs en douceur

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L'"île chocolat"! São Tomé a gagné ce nom savoureux, en 1913, lorsque l'archipel était le premier producteur de cacao au monde. Son vrai nom, elle le doit à saint Thomas, honoré le jour de sa découverte par les Portugais, en 1470. Plus simplement, Principe - Prince - fut ainsi appelée en hommage au dauphin royal. Si, à 350 kilomètres des côtes du continent noir, le touriste fait figure d'extraterrestre, les Santoméens, aimables et curieux, accueillent chaleureusement l'étranger venu visiter leur archipel volcanique. D'entrée, dans cette ancienne colonie portugaise, la coexistence entre modernité et traditions saute aux yeux : des écoliers en uniforme révisent à l'ombre des jaquiers, tandis que des femmes lavent le linge en groupe au bord des ruisseaux. 

Le marché de São Tomé demeure le royaume des marchandes qui proposent légumes du potager et poissons du jour. La pêche, elle, est l'apanage des hommes. Leurs barques en bois de fromager forment d'ailleurs de petites colonies en rangs serrés et, chaque matin, on observe ces silhouettes pagayant debout sur ces troncs d'arbres évidés poussés par une voile rouge ou blanche. Le soir, c'est généralement la fête sur les plages, mais, dans les villages, tout le monde préfère papoter devant l'unique télévision installée sur la place centrale !

Des bébés tortues qui courent vers le rivage 

Indépendant depuis 1975, l'Etat a hérité d'un passé colonial flamboyant, dont ces "roças" qu'il a finalement attribuées à des particuliers sous forme de concessions. Certaines de ces aristocratiques fermes coloniales roses ou bleues récoltent toujours les fèves de cacaoyers, mais, faute de maind'oeuvre, la production ne dépasse pas aujourd'hui les 2 000 tonnes par an, toutefois d'une qualité exceptionnelle. Une fois trans -formée, la fève offre un chocolat d'une douceur incomparable. D'autres roças se métamorphosent en exotiques maisons d'hôte. Mais la plupart, hélas, sont abandonnées, englouties par la jungle. Un étrange monde clos, empreint de la douloureuse mémoire de l'esclavage, où cimetière, hôpital, chapelle, manufacture sont adossés à la maison du maître cernée de jardins bien peignés. 

La nature sauvage est sans doute l'atout majeur de São Tomé-et-Principe. Les îles soeurs abritent en effet d'exubérantes forêts primaires où règne une faune unique. Comme les routes sont impeccables, grâce à l'aide taïwanaise, on découvre vite que ce minuscule Etat combine hardiment paysages de Caraïbe et savane africaine, avec le pic du Cao Grande ("Grand Chien"), qui jaillit de la jungle, tel un diable, à 663 mètres d'altitude, et des montagnes (jusqu'à 2029 mètres) fichées comme des banderilles en son milieu ! Sur "São", le parc Obo permet une approche guidée de la jungle, mais il faut aimer les dénivelés dans un air chaud et moite, ou avoir l'âme d'un ornithologue pour repérer quelques-unes des 180 espèces d'oiseaux, dont 30 endémiques. 

Emerveillé, on lézarde sans fin sur des plages dorées, infinies, désertes. Parmi les plus belles, Conchas et Tamarin, composées de coquillages concassés, et Lagoa Azul, au nord, un lagon environné de baobabs. A l'est et au sud-est, Sete Ondas et Micondo offrent de merveilleux paysages, ainsi que Praia Jalé, Niname et Xixi (dites Chichi). Sur ces plages qui se dissimulent au bout des plantations, on peut observer, en janvier, l'éclosion des oeufs de tortues et voir les bébés courir vers le rivage. De nombreux programmes visent d'ailleurs à leur protection et à l'édu -cation des habitants qui ont la fâcheuse habitude de consommer leurs oeufs ! 

Cet éden a tout du pays de cocagne. Sur ses terres fertiles, il suffit de tendre le bras pour cueillir un "sapsap" - un fruit de douze kilos - ou une mangue. Même du pétrole a été récemment découvert au large ! Optimiste sur son avenir, le pays reste toutefois pauvre. Cela se manifeste à São Tomé, la charmante capitale posée sur l'arc de la baie Santa Catarina, dont les balustres de l'avenue Marginal, le long de la mer, et les maisons de bois rafistolées ont du mal à tenir debout. L'île dispose néanmoins d'excellents hôtels, tels les très confortables établissements de la chaîne portugaise Pestana, ainsi que les fameuses maisons coloniales restaurées, comme la Roça Sãn João Angolares. 

Parmi les derniers paradis, loin du tourisme conventionnel, le charme et la douceur créole de l'"île chocolat" opère comme une potion magique.

Florian Silnicki